jeudi 2 octobre 2014

Le futurisme.

" Une automobile de course avec son coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l’haleine explosive … est plus belle que la Victoire de Samothrace. "
La déclaration parue dans le Figaro date de 1909, de la main de Marinetti qui signe le manifeste de l’école "futuriste" essentiellement italienne présentée par Gilbert Croué aux amis du musée de Grenoble.
Ce n’est pas le panache qui manque dans leur proclamation pleine de bruit et de fureur, les mots flamboyants  pleuvent depuis «  le promontoire extrême des siècles » portant « un défi aux étoiles » :
« amour du risque », « énergie », « témérité » rejoignent « insomnie fiévreuse », « saut périlleux » et « coup de poing ».
Le juvénile optimisme de la petite bande à l’orée du siècle balance :
« L’Italie a été trop longtemps le grand marché des brocanteurs. Nous voulons la débarrasser des musées innombrables qui la couvrent d’innommables cimetières. »
Mais d’autres intentions « craignent » :
« Nous voulons glorifier la guerre - seule hygiène du monde -, le militarisme, le patriotisme, le geste destructeur des anarchistes, les belles Idées qui tuent et le mépris de la femme. »
Après la domination autrichienne une fierté nouvelle se cherche en Italie.
Marinetti, le poète symboliste commence avec les anarchistes et finit chez les fascistes.
Dans son mouvement  où il prône le vers libre, arrivent des peintres, des musiciens, des architectes  pour  chanter « les ponts aux bonds de gymnastes lancés sur la coutellerie diabolique des fleuves ensoleillés… » et « tuer le clair de lune »
Balla  influencé par le divisionnisme de la touche picturale chez les pointillistes connait aussi les travaux de Marey et de Muybridge, photographes décomposant les mouvements.
Son «  dynamisme d’un chien en laisse »  est emblématique comme sa « Lampe à arc ».  Ses chantiers et banlieues où les ouvriers sont bien présents, décrivent son époque et une foi dans le progrès qui nous a abandonnés.
Boccioni  a écrit : « Tandis que les impressionnistes font un tableau pour donner un moment particulier et subordonnent la vie du tableau à sa ressemblance avec ce moment, nous synthétisons tous les moments (temps, lieu, forme, couleur, ton) et construisons ainsi le tableau. » Il a produit aussi « La rue entre dans la maison » magnifique tableau et une célèbre sculpture puissante et dynamique qui vaut mieux que son intitulé : «  Formes uniques dans la continuité de l'espace » qui entrechoque les points de vues.
Severini  accorde aussi l’art à la science. La « Danse du Pan-Pan au Monico » rythmée, luxuriante, de ses années parisiennes précède un « train blindé » où le métal tonne.
Carra, le plus politique  dans ses « Funérailles de l'anarchiste Galli », peut se confondre avec De Chirico et sa peinture métaphysique, il reviendra au réalisme après avoir été cubiste.
Russolo peint «  la révolte » avec lyrisme mais son apport est majeur dans les arts du son où il annonce la musique bruitiste, concrète, voire électronique.
Sant'Elia  architecte envisage une cité nouvelle et influence Le Corbusier.
L’avant-garde russe s’inspire de ce mouvement qui intégre des mots sur les toiles et secoue les formes cubistes. Les œuvres de Delaunay, Léger, Gris, Duchamp, Malevitch voire Tinguely ont des airs de famille avec ce mouvement qui se dispersera après la  première guerre ayant fécondé  aussi la poésie : Apollinaire, Maïakovski, le design et bien sûr le cinéma : « Métropolis », fatalement, puisque la traduction du mouvement fut leur obsession.
L’exposition "Futurismo & Futurismi" du Palazzo Grassi de Venise en 1986 fit oublier le silence gêné qu’avaient généré des fréquentations douteuses avec le Duce.
Sont partis au vent, les tracts lancés jadis depuis le campanile de la place Saint Marc:
« Nous répudions l'antique Venise exténuée et anémiée par des voluptés séculaires, nous répudions la Venise des étrangers amants du snobisme et de l'imbécillité universels... »


1 commentaire:

  1. ils voulaient combler le Grand Canal et le remplacer par une autostrada... il ne faut pas mettre dans le panier tous les "avant-gardistes", à mon avis... certains étaient plus intelligents que les autres!

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