dimanche 25 janvier 2015

Satie, Michaux. Chouinard.

La chorégraphe canadienne, nous a offert deux séquences de danse distinctes et notre plaisir a été entier avec tant d’inventivité et de simplicité, de douceur et de puissance électrique, de drôlerie et de profondeur. Exceptionnel !
Dans  les Gymnopédies de Satie, les danseurs viennent au piano: la lenteur de la musique nous enveloppe, sa délicatesse convient parfaitement aux apparitions de corps nus magnifiques depuis une enveloppe de tissus qui peut évoquer Penone installé récemment au musée, lui qui  remet l’homme  parmi les arbres.
Les corps se frôlent, les plaisirs sensuels peuvent s’exhiber derrière un nez rouge, les copulations sont joyeuses, les duos beaux. On voudrait que le temps s’étire comme lors d’habiles au revoir à la fin de la première partie, jouant avec nos applaudissements qui ne furent  pas comptés.
Michaux s’accordait bien à nos postures lycéennes, aujourd’hui je craignais son hermétisme, et ce fut une révélation. « Les mouvements » donnent vie aux signes tracés sur le papier.
Pour avoir tenté de saisir par le dessin des gestes de danse dans un atelier de dessin, j’ai intensément vécu la recherche autour des calligraphies du poète pour faire surgir la vérité des corps. Vêtus de noir, hommes et femmes se succèdent, fusionnent, dansent, crient, parfaitement associés à la cascade de dessins projetés : cette énumération distrayante et poignante est une performance de mémoire, de justesse.
« Au vacarme
au rugissement, si l’on donnait un corps...
aux sons du cymbalum, à la foreuse perçante
aux trépignements adolescents qui ne savent encore
ce que veut leur poitrine qui est comme si elle allait éclater
aux saccades, aux grondements, aux déferlements
aux marées de sang dans le cœur
dans les artères tout à coup changeant de sens
à la soif
à la soif surtout
à la soif jamais étanchée
si l’on donnait un corps ».
J’ai vu des électrochocs et la mort quand une page blanche interrompt le flux des figures effectuées avec une musique percussive, envoutante et brutale de Louis Dufort.
Sous des lumières stroboscopiques, des danseurs pales viennent conclure : la blancheur des rêves s’invite en négatif après l’empreinte intense et fugitive de noires virgules rythmant tant de mots enfouis.

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