mardi 30 mai 2017

L’étrange. Jérôme Ruillier.

L’étrange c’est l’étranger comme chez Prévert :
Etranges étrangers :
« Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
Hommes de pays loin
Cobayes des colonies
Doux petits musiciens
Soleils adolescents de la porte d’Italie
Boumians de la porte de Saint-Ouen
Apatrides d’Aubervilliers
Brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
Ébouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pied
Au beau milieu des rues »
Mais la poésie a disparu, et l’humanité. Par désir d’universalité, ni lieux, ni protagonistes ne sont nommés : sous des apparences animales, les personnages aux regards vides se croisent et aucun des récits écrits au crayon d’une écriture soignée qui composent cet ouvrage ne sourit.
Le sans papier :
« Il pensait qu’il avait fait le plus dur, qu’il avait réussi.
En réalité, c’est une autre vie qui commençait, mais pas celle dont il avait rêvé. »
Les 150 pages anguleuses dessinées sèchement sur fond de craie en couleur sont éditées sous le patronage d’Amnesty International.
Le dessinateur grenoblois remercie la section Réseau Education Sans Frontières de Voiron ; nous sommes en territoire connu, sans surprise, sans enjeu : passeurs, policiers et réseaux d’aide sont là, mais si une corneille apporte un point de vue  un  peu original, le clandestin accablé de bout en bout de l’histoire reste à distance.
La référence à « Maus » de Spiegelman par quelques critiques est  pour moi gênante : le destin des juifs déportés et exterminés par les nazis  fut d’un autre ordre et l’anthropomorphisme froid de cet album est bien sommaire. 

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