mercredi 13 août 2008

Coquillages et crustacés


A Sète est installé depuis quelques années sur le quai De Lattre De Tassigny, le Musée International des Arts Modestes (MIAM) - le bien nommé : rigolo, paradoxal, il vous ouvre l’appétit. Cette année l’exposition temporaire est consacrée aux coquillages et crustacés, inévitables dans ces lieux dédiés aux productions artistiques populaires. Matériaux fascinants, depuis les plages d’où naquit l’humanité et que fréquenta une Vénus de Botticelli. Les boucliers des gastéropodes assemblés ou gravés, recolorés, fournissent des occasions infinies à la créativité : bijoux, éléments collés en tableaux ou en sculptures. Les structures kitsch ou raffinées, détournées, en vidéo ou échappées des étals touristiques, interrogent nos parti - pris artistiques mais aussi la notion même d’existence pour nos consciences de bigorneaux. J’éprouve toujours le même plaisir à revenir dans ces lieux rares ou l’art ne cherche pas à intimider mais à relier. Cependant si l’exposition permanente garde son charme désuet, il serait bon de veiller, avec le même soin que pour son site Internet, à ce que ces témoignages très années 60 qui prolongent la mémoire enfantine ne prennent pas trop la poussière, au-delà des flétrissures seyantes à la nostalgie.

mardi 12 août 2008

Cimetières marins

Hé, non, finalement, Georges ton cimetière n’est pas plus marin que celui de Paul Valéry !
Il y a quelques années à la recherche de ta tombe, j’avais pu voir celle de celui qui écrivit « ce toit tranquille où marchent les colombes ». Il a donné son nom à son cimetière marin qui surplombe depuis le Mont Saint Clair, la ville de Sète et la mer.
Jean Villard est là aussi, et j’ai le souvenir de la douleur d’un conjoint qui avait fait inscrire dans la pierre tout son désespoir d’avoir perdu sa femme dans un incendie ; en définitive, il lui avait survécu fort longtemps. Alors que le tien, chez les pauvres, celui du Py, dit des « ramassis », donne sur l’étang de Thau, il est vrai en direction de la plage de la Corniche. Ce moment au pays des pierres vaut bien des messes. J’ai usé du tutoiement, puisqu’avec le temps, ce Georges m’a parlé bien plus longtemps que bien de mes familiers. Mais je garde, comme il dit toute révérence, puisque les mots du croque-notes viennent bousculer les miens dans ces contrées où l’on devise de la camarde.
Sa tombe modeste est à l’image de l’intégrité dont il fit preuve dans sa vie et dans son œuvre. Les délices de son verbe prennent encore plus de prix, alors que le lexique des sentiments se réduit. Son anti-conformisme nous requinque face à toutes les trahisons ; son allégresse, sa générosité nous consolent de bien des duretés de l’heure. Une part d’éternité peut tenir sur quelque C.D. , non ?

lundi 11 août 2008

Gomorra


Balles tragiques à Napoli. Qui ne sait le poids de la maffia en Italie ? Nécessaire de rappeler : 4000 morts dans les 30 dernières années( 10 000 est un autre chiffre cité). La sinistre pieuvre a pris le virage de la mondialisation. Le libéralisme dans sa forme la plus sauvage a encore de beaux jours devant lui avec le travail clandestin, la gestion de la misère économique et intellectuelle qui ne prend pas que les quartiers déshérités dans ses filets. La haute couture y frotte ses dentelles. Film efficace.

lundi 4 août 2008

« L’euphorie perpétuelle, la suite »


Le sujet est grave : l’injonction d’être heureux creuse les angoisses. Le traitement théâtral dans le off d'Avignon est malicieux, brillant. Le show du one man, Pascal Thoreau, est succulent : sa bouche sourit mais ses yeux sont tristes. Des citations bien placées, comme on respire, bien liées par le texte de Bruckner à la langue impeccable de précision. Dialogue drolatique et habile avec le public en réponse à un questionnaire distribué avant le spectacle.

dimanche 3 août 2008

Victor Hugo vivant


Quand pour défendre les acquis de la gauche au pouvoir, nous en revenons à chaque fois sur l’abolition de la peine de mort, nous pouvons admettre que cette mesure ne s’appliquait qu’à des situations exceptionnelles. A réviser les phrases de Victor Hugo à ce sujet c’est bien une haute idée de l’Homme qui aboutissait, en plus du courage d'aller à l’encontre de la vox populi. La force des mots de celui qui apparut comme emphatique et « too much » à nos générations cyniques, redonne de la profondeur, du souffle aux combats d’aujourd’hui.
Ce qu’il dit de l’Europe, de la lutte contre la misère est tellement fort, que la légende d’autres siècles éclabousse ce nouveau.
A Avignon, deux spectacles, parmi d'autres, illustrent l’actualité du pair de France.

« Mon alter Hugo » de Gérard Berliner qui s’est approprié l’homme illustre et nous le livre en textes et chansons avec la pointe d’humour nécessaire à l’admiration. Comédie musicale pour un homme.

Dans «Aimer c’est plus que vivre » d’Anthéa Sogno , l'auteure-actrice, met dans la lumière Juliette Drouet, la maîtresse de celui qui rassembla 2 000 000 de personnes à son enterrement, sans le buzz internet. La sincérité des acteurs nous enchante, nous transporte d’émotion. Nous pardonnons à ce cavaleur, il nous a tellement donné. Les amants se sont échangés 40 000 lettres. L’intensité de leurs sentiments ragaillardit le romantisme avec des mots qui osent la grandeur et nous élèvent au dessus des petits calculs. Après la mort de Juliette, Victor n’a plus écrit.

samedi 2 août 2008

Siné, cinéma.


Oh, la la ! « Liberté de la presse ! » « Antisémitisme ! » : le combat qui se joue sur le net toucherait au grandiose, s’il n’était assorti à l’égard de Philippe Val, de tant de haine. Celui-ci a viré Siné de Charlie hebdo pour des propos douteux, qui l’ignore ? Mais comme dans tous les divorces, c'est un fait malheureusement assez ordinaire qui a tout déclenché. La dernière saillie de Siné n’était pas la pire. Mais comme Polac, sa persistance devient pathétique : qu’ils aillent comme d’autres retraités, faire du bénévolat et laissent leurs colonnes à de nouvelles plumes. Val n’est certes pas un marrant, mais il essaie de sortir des schémas trop simplistes, des caricatures. Les amateurs de gros traits, de gros mots n’apprécient pas. La détermination des pétitionnaires de chaque camp serait mieux employée à d’autres combats. Le jour où Carla dédicaçait son C.D. aux ministres, les ravis venaient de créer une nouvelle niche fiscale pour l’Outre-mer (source « arrêt sur image »).

vendredi 1 août 2008

Photographies à Arles


Les fracas du monde ne sont pas parvenus aux rencontres photographiques cette année, par contre l’amenuisement des moyens alloués à la culture se fait sentir. Bien des lieux qui restaient ouverts pendant deux mois ne sont plus accessibles aussi longtemps que les autres années. Christian Lacroix était le maître d’œuvre des rencontres cette année ; difficile de ne pas le savoir. L’habillage des murs en était revigoré mais en dehors de Pierre Gonnord aux portraits éclatants à la Murillo peu de personnalités emballantes. Avedon et ses squelettes avec belle femme : c’est bien. Les photothérapies de Bhadra qui fait exprimer les rêves de femmes traumatisées, émouvantes ; comme sont intéressantes des photos de femmes de détenus ou celles d’appartements communautaires à Saint Petersbourg. Mais la beauté des lieux d’exposition nous reste plus en mémoire que bien des œuvres exposées. Oui, il y avait des séries de wagons, des dompteurs de hyènes, des univers anglais avec une rivière dans le salon, des portraits de courtisanes du second empire avec les cahiers de police les concernant, plus poétiques que les fichiers de Dati et Hortefeux. Des photos récupérées dans la rue, troublantes dans leur dispositif immense. Mais déception, même si c’est toujours revigorant une bonne douche de belles images.