jeudi 29 juillet 2010

Henri Renou Lyat

Henri est mort, il a résisté au cancer pendant des années.
En cette fin juillet à Bourg, nous étions nombreux à accompagner sa famille et ses amis.
Je suis fier de l’avoir connu autour des ronéos à la Bourse du Travail, derrière des piles d’enveloppes à adresser pour faire partager nos convictions. Le syndicalisme CFDT chez les enseignants ne se réduisait pas à la défense d’une corporation, mais se devait d’associer les parents au service des enfants. La vie ne se séparait pas de la classe, le laboratoire d’idées se nourrissait de réalisations concrètes.
Artisan en pédagogie ; à sa retraite, il a milité chez Artisans du Monde.
Avant les bonifications financières, il avait choisi de s’installer à l’école du Grand Chatelet à l’Abbaye, avec Suzanne son épouse, où il s’occupa en particulier des enfants gitans.
Plus tard il travailla dans les lieux d’accueil de nuit des habitants de la rue.
Producteur de BT (bibliothèque du travail); il y a peu, il reliait des livres.
« Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,
Fait couler le rocher et fleurir le désert
Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert
L’empire familier des ténèbres futures. »

Baudelaire (Les bohémiens)

mercredi 23 juin 2010

Bonnes vacances

Je suis arrivé au bout de notre journal de voyage au Viet Nam, mis en ligne chaque mercredi après des écrits concernant mes années d’école.
Le lundi, la matière vient à manquer, en cette saison, pour parler de cinéma.
Pour alimenter la rubrique BD du mardi et celle du vendredi sur les livres, il faut que je retrouve du temps pour lire et courir les expos pour le jeudi et les spectacles pour les dimanches blogger.
Alors je fais une pause, pourtant en ce qui concerne la politique du samedi, la matière est surabondante, parce que comme disait Nicolas :"Désormais quand il y a une grève en France on ne la remarque plus".
Je m’étais promis de ne pas ajouter mes bavardages sur lébleus, ou alors juste un petit mot pour retenir les paroles d’Emmanuel Petit le célèbre philosophe: « c’est la fin d’un héritage » qui vaut mieux que celles de Finki qui décidément quand il parle de foot se fourvoie.
Avant de suspendre la mise à jour de ce blog pendant deux mois, la trace d’une énigme, que je n’arrive pas à résoudre.
Aux débats du forum de Libération, j’ai croisé quelques camarades dans les couloirs d’Alpexpo entre deux ateliers sur la fraternité, la démocratie locale. Je persiste à être atterré par la distance des paroles aux actes : quand nous militants de la gauche dispersée, applaudissons à la nécessaire bienveillance alors que se ressassent près de chez nous les blessures du passé, nous remplissons des carnets avec des beaux mots de ces états généraux qui s’intitulaient du « renouveau » pour lesquels nous prenons bien mal notre part, ici et maintenant.
Les mots de Destot listant les atouts de la France : « démographie favorable, forte capacité individuelle d’innovation, attractivité des villes françaises… » ne diminuent pas mon pessimisme. Le maire de Grenoble a parlé aussi « du chômage, de la précarisation, de la mise en cause récurrente du système éducatif, du malaises de la jeunesse, de la ségrégation territoriale, de l’abstention grandissante… » de quoi nous élargir le regard... et alors ?
Le papier que Domenech a lu parlait de valeurs ! Le papier était froissé, l’humiliation va bien au-delà de Raymond. Quand même le temps de matchs qui auraient pu nous alléger, l’illusion de vivre ensemble se fracasse, il ne nous reste qu’à constater que nous appartenons à un pays qui ne s’aime plus.
Sans leader c’est la tyrannie du n’importe quoi, revenir aux fondamentaux de chez basique : « l’union fait la force ».
J’avais dit juste un mot.
Je reprends les publications sur ce blog en septembre

mardi 22 juin 2010

Mon bel amour.

Bel ouvrage de Frédéric Poincelet qui n’est pas vraiment un dessinateur à la ligne claire avec des personnages cernés d’un trait aux personnalités lisses et tranchées. Ses dessins à la plume saisissent plutôt les pilosités de ses protagonistes, sans les flatter, sans les caricaturer, sans les maquiller. Il rend les vibrations de la vie, l’entre deux des relations hommes/femmes, d’un bord de mer à un canapé, par portables interposés, silences prolongés, ou bavardages entre copines.
Un moment de tendresse quand une conversation arrive depuis l’étage du dessous par la fenêtre ouverte. L’écriture des dialogues minimalistes tracés d’une plume également légère s’inscrit dans des taches blanches sur fond beige. Chacune des seize scénettes est précédée d’une phrase de Gide : « Il entre dans toutes les actions humaines, plus de hasard que de décision. » « On sent si bien quand un objet se détache de vous, veut vous quitter comme un enfant qu’on ne tient plus en main, qui s’émancipe, Un instant d’inattention et le tour est joué. »
Ces tranches de vie se laissent entrevoir dans une forme originale où la bande dessinée apporte de la nouveauté au récit éternel des histoires d’amour et de solitude.

lundi 21 juin 2010

Année bissextile. Michael Rowe

La solitude d’une femme à Mexico, malgré les moyens de communication modernes qui deviendront les instruments de ses mensonge et de son enfermement dans la folie.
Parmi les hommes qui lui passent dessus, elle choisira celui qui sera l’instrument de son suicide.
Les scènes burlesques de coucherie tournent au malaise quand la violence s’aggrave jusqu’à la transgression ultime, à moins qu’une issue bienheureuse à l’américaine, qui nous insupporte d’habitude, vienne désamorcer une montée insoutenable de la tension.
Des scènes sado- maso insupportables. Quand la demande de quelques mots est aussi une demande de reconnaissance, des bribes de tendresse venant après les sévices ne peuvent qu’ouvrir les portes les plus mortifères.

dimanche 20 juin 2010

Impressing the Czar

Il n’y a pas eu que le tzar à être impressionné par le premier tableau du ballet des Flandres reprenant une création de Forsythe datant de 1988 et qui a gardé sa force d’étonnement. Pour user fréquemment de l’ironie, voire en abuser, j’ai pourtant été désarçonné par la dérision en beaux costumes avec danseurs virtuoses. J’ai eu le même étonnement que lorsque je vois un tableau impressionniste dans son cadre empesé et daté, et pourtant il n’en parait que plus moderne. J’avais beau trouver salutaire que cette esthétique Figaro madame soit bousculée, et apprécier le rythme endiablé, les saynètes hachées, inachevées étaient trop hétéroclites : les nombreuses flèches rataient leur cible. Ce n’est qu’au deuxième tableau que je retrouvais mes marques avec une danse contemporaine, classique, magnifiquement exécutée. Un plaisir intense confirmé par un final époustouflant où l’humour à ce moment là me convenait mieux avec un dynamisme constant qui a emporté un public finalement conquis.

samedi 19 juin 2010

Conformes.

A en juger par la fatigue de mes anciens collègues instits, l’état de santé de l’éducation nationale me semble au plus bas devant les tableaux interactifs.
La fermeture massive des postes, conjuguée au tourbillon incessant des annonces cathodiques, minent les soutiers. Brushing Chapel et paperasse vous lassent!
Mais ce qui me semble encore plus grave, c’est la mise à bas de toute une culture qui était celle des enseignants où les personnalités comptaient. Les valeurs sont inversées sous l’enfumage médiatique, le mensonge devient la norme. Les créateurs sont sur le banc.
La droite avait effectué le rapt du mot liberté quand s’est imposé le terme école « libre » pour désigner l’école privée. Les libéraux affaiblissent l’état, et par ailleurs d‘une main de fer, ils mettent au pas l’éducation nationale en la transformant en service aux consommateurs, en usine à conformisme.
L’autoritarisme le plus implacable sous les mots cool and fun.
Voir la grotesque épreuve intitulée « Agir en fonctionnaire de l’état et de façon éthique » introduite au CAPES et à l’agrég’.
Combien de vocations sont nées en rencontrant des profs ou des instits qui « y croyaient », qui justement n’avaient pas l’obéissance comme vertu cardinale. Il y avait du respect, des couleurs, de la vie.
Bien loin le temps où, sûr de son autorité, De Gaulle refusait de bâillonner Sartre ; aujourd’hui Sarko et sa bande aux ordres s’imposent jusque dans les divertissements, et ses laquais zélés, recteurs, inspecteurs, font régner l’ordre bling, bling :
une, deux ! Zéro.
Une pétition est en ligne pour exiger le retrait de l’épreuve
« agir en fonctionnaire de l’état et de façon éthique et responsable »
en tapant sur votre moteur de recherche : contrôle moral pour aller sur le site :
http://www.petitiononline.com/mod_perl/petition-sign.cgi?azby1111

vendredi 18 juin 2010

La scène. Maryline Desbiolles

J’avais acheté ce livre pour consoler une ancienne élève élevée à la mathématique moderne et qui en conservait un souvenir d’ennui, mais elle est restée rétive à la poésie que l’auteure niçoise apporte aux réunions, intersections, jusqu’à l’infini. Elle n’a pas aimé ces bavardages, moi j’ai adoré ces vagabondages autour des tables avec ce qu’elles cachent, ce qu’elles révèlent : les souvenirs, les échappées autour de la Cène et des tableaux. Dans la lignée de la savoureuse « Seiche », un roman précédent. La photographie est aussi un bon déclencheur d’écriture et le contenu des assiettes a encore de l’importance. Les saveurs, les intentions quand on prépare, et la mort qui rôde. J’étais bien tourné pour apprécier ces digressions où se mêlent l’anodin et des rêveries sublimes, le doux parfum des souvenirs perdus et la recherche d’une écriture intense qui forcément tâtonne et m’a séduit.
« …nous rions en nous même, avons-nous une tête à nous asseoir à table ?et nous avons passé l’âge de nous rouler dessous, nous marchons sur la grande table du monde, nous renversons les assiettes et foulons sa nappe… »